Auteur: Stagire
Date: 27-11-2016 20:12
JeuneCherchant a écrit:
> Ma question porte sur l'existence de l'intelligence, justement;
> ou plutôt, sur l'existence d'un ordre.
Pour nourrir vos réflexions :
Catégories 12 et 13
12
Une chose est dite antérieure de quatre façons.
En un sens premier et fondamental, c’est selon le temps d’après lequel une chose est dite plus vieille et plus ancienne qu’une autre : c’est parce qu’il s’est écoulé plus de temps qu’on. appelle la chose plus vieille et plus ancienne.
En second lieu, est antérieur ce qui n’admet pas de réciprocation en ce qui concerne la consécution d’existence’ : par exemple, le nombre un est antérieur au nombre deux, car si deux est donné, il s’ensuit immédiatement qu’un existe, tandis que si c’est un qui est donné, il ne s’ensuit pas nécessairement que deux existe. Ainsi l’existence du nombre un n’en traîne pas, par réciprocation, celle de l’autre nombre. Il semble donc bien qu’est antérieur ce dont la consécution d’existence n’admet pas de réciprocation.
En troisième lieu, l’antérieur se dit par rapport à un certain ordre, comme dans les sciences et les discours. De fait, dans les sciences démonstratives, il y a l’antérieur et le postérieur selon l’ordre : les éléments sont antérieurs selon l’ordre, aux propositions géométriques, et, dans la grammaire, les lettres sont [14b] antérieures aux syllabes. Et de même, dans les discours, le préambule est antérieur selon l’ordre, à l’exposition.
Outre les sens dont nous venons de parler, il y en a un autre : ce qui est meilleur et plus estimable semble bien être antérieur par nature. Dans le langage courant, on dit des hommes qu’on estime le plus et qu’on aime le mieux qu’ils sont avant les autres. C’est là sans doute le plus détourné de tous les sens d’antérieur.
Tels sont donc, à peu près, les différents modes d’antérieur.
Il semblerait cependant qu’en dehors des sens d’antérieur que nous venons d’énumérer, il y en eût un autre. Dans les choses, de fait, qui admettent la réciprocation en ce qui concerne la consécution d’existence, la cause, à un titre quelconque, de l’existence d’une autre chose semblerait devoir être antérieure par nature. Or il est évident qu’il existe des exemples de ce genre : l’homme réel se réciproque selon la consécution d’existence avec la proposition qui est vraie à son sujet. Si, en effet, l’homme existe, la proposition par laquelle nous disons que l’homme existe est vraie aussi ; et réciproquement, si la proposition par laquelle nous disons que l’homme existe est vraie, l’homme existe aussi. Cependant la proposition vraie n’est en aucune façon cause de l’existence de la chose ; c’est au contraire la chose qui semble être, en quelque sorte, la cause de la vérité de la proposition, car c’est de l’existence de la chose ou de sa non-existence que dépend la vérité ou la fausseté de la proposition.
C’est donc bien de cinq façons qu’une chose est dite antérieure à une autre.
13
Simultané se dit, au sens simple et le plus fondamental du terme, des choses dont la génération a lieu en même temps, aucune d’elles n’étant antérieure ni postérieure à l’autre. Elles sont dites simultanées dans le temps.
Sont simultanées par nature les choses qui se réciproquent en ce qui concerne la consécution d’existence, sans que l’une soit d’aucune façon la cause de l’existence de l’autre. Tel est le cas du double et de la moitié : ces termes se réciproquent (car si le double existe, la moitié existe, et si la moitié existe, le double existe), bien qu’aucun des deux ne soit la cause de l’existence de l’autre.
Les espèces qui, provenant de la division du même genre, sont opposées l’une à l’autre sont aussi appelées simultanées par nature. Par « opposés l’un à l’autre dans la division », j’entends les termes qui sont opposés selon la même division ; par exemple, l’ailé est simultané au pédestre et à l’aquatique. Ces termes sont opposés dans la division, quand ils proviennent du même genre, car l’animal est divisé en des espèces comme l’ailé, le pédestre et l’aquatique ; aucune d’elles n’est antérieure, ni postérieure, mais de tels termes semblent bien être simultanés par nature. Chacune de ces espèces, le pédestre, l’ailé et l’aquatique peut être à son tour divisée en espèces : il y aura donc aussi simultanéité naturelle pour ces dernières espèces qui proviennent du même genre, selon la même division.
Par contre, les genres sont toujours antérieurs aux espèces, car il n’y a pas réciprocité au point de vue de la consécution d’existence : par exemple, si l’aquatique existe l’animal existe, mais si l’animal existe l’aquatique n’existe pas nécessairement.
On appelle donc simultanés par nature les termes qui se réciproquent en ce qui concerne la consécution d’existence, sans que l’un soit, en aucune façon, la cause de l’existence de l’autre ; ensuite, les espèces qui s’opposent l’une à l’autre dans la division à partir du même genre. Enfin sont simultanés, au sens simple, les êtres dont la génération a lieu en même temps.
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